La stratégie joue un rôle capital dans l’action de développement ou la définition des politiques. Il s’agit de savoir comment, quand et avec qui agir. Les stratégies doivent amener le changement en partant de la situation réelle où l’on se trouve. La stratégie permet à l’utopie de devenir réalité car elle facilite la communication entre les différents groupes.

Les stratégies de que l’IRED tend à promouvoir peuvent se décrire de la façon suivante :

La référence de toute activité de l’IRED est celle de la cellule de base (le terrain) où les populations vivent journellement, que ce soit le quartier d’une ville, un village ou une entreprise.

Le développement doit répondre aux besoins essentiels de la population. Il doit “permettre d’éviter la violence, la misère, l’aliénation et la répression”. La pauvreté, c’est aussi ne pas participer au pouvoir.

Toute action suppose la participation de la majorité des personnes concernées. Cette politique de participation suppose la responsabilisation du plus grand nombre possible d’individus et la création de petites unités d’action qui favorisent cette responsabilisation.

La population cible de l’action de l’IRED se compose de toutes les personnes qui, dans les villes et les villages, constituent la masse des moins privilégiés. Cependant, l’IRED doit agir pour associer à ses propres objectifs, non seulement les leaders de ces groupes, mais aussi les représentants des Services techniques, du Parti et des Gouvernements. Elle cherchera également à travailler en liaison étroite avec les techniciens, les entreprises et les élites locales et régionales, si les objectifs de ceux-ci sont dirigés vers la lutte contre la pauvreté.

Le développement doit être intégré. L’addition de l’action sectorielle, qu’elle soit petite ou plus importante, n’apporte pas forcément le développement. Elle tend quelquefois à diviser et à dominer davantage.

Il faut distinguer le développement aux niveaux local, régional, national et international. La programmation et la planification de l’action sont des démarches nécessaires à condition que les représentants des populations locales y soient associés.

Le développement suppose la recherche d’un équilibre maximum entre le secteur privé et le secteur public, le rôle de l’administration et la participation des populations, le développement des villes et celui des campagnes, l’industrie et l’agriculture, et entre régions.

La décentralisation du pouvoir est un des choix techniques à promouvoir. Le contrôle de l’aide extérieure et du financement du développement doit être sérieusement organisé, ainsi que la formation des personnes sur lesquelles reposeront les choix et l’action opérationnelle à tous les niveaux.

La stratégie opérationnelle de I‘IRED s’articule autour des thèmes d’action suivants :

Accès à l’information. L’information constitue à l’heure actuelle un nouveau pouvoir. Sans l’accès à l’information, les organisations de développement demeureront dans la marginalité. L’IRED doit donc mettre à leur disposition toute l’information nécessaire à la prise de décision et à l’organisation de leur action.

La progression vers l’autonomie. Elle repose sur une stratégie en plusieurs étapes :
La compétence et la crédibilité des Organisations, indispensable à leur autonomie économique et politique.

Le renforcement des capacités d’auto gestion au niveau du village ou d’un groupe de villages, qui doit permettre de rentabiliser les activités entreprises, partant une augmentation des revenus qui permettra l’autofinancement des organisations de développement.

Le renforcement des méthodes de gestion, de planification et d’évaluation, et la formation des cadres.

La recherche d’alternatives au système de financement actuel, basé sur l’aide extérieure par projets, par exemple le développement d’opérations d‘épargne et de crédit ou de nouveaux mécanismes de capitalisation.

La formation des cadres des organisations aux négociations et à une meilleure connaissance des problèmes et mécanismes macro-économiques, condition de leur action au niveau local. Ceci afin que l’autonomie de ces organisations ne soit pas seulement financière et économique, mais également sociale, politique, et économique.

La construction de nouvelles solidarités. L’isolement est l’ennemi des organisations populaires. Grâce à une meilleure communication, des réseaux doivent se créer et donner le jour à de nouvelles solidarités à tous es niveaux : local, régional, national, continental et enfin mondial. Ce sont ces nouvelles solidarités qui permettront de proposer des réponses crédibles, qui pourront alors être appuyées par des organisations solidaires et fortes.

La formulation de propositions alternatives. L’IRED doit s’engager dans une critique sans complaisance du système de domination, de ses rouages et de ses conséquences. Cependant, la critique n’étant pas suffisante, des alternatives, nées de la concertation avec les organisations locales, doivent être proposées.
Agir ensemble pour le changement. Pour changer les lois, les mentalités, les structures et les systèmes, il faut agir ensemble, de façon organisée et concertée.

L’IRED doit non seulement s’engager dans des propositions alternatives, mais également, à côté de ses partenaires locaux, dans des opérations de Lobbying et d’advocacy qui leur permettront de défendre leurs droits et d’influencer des décisions dont dépend leur avenir.

Toutefois, Lobbying et advocacy ne sont pas suffisants. Les mouvements populaires ont une grande puissance (dont ne disposent pas les ONG) : celle du nombre de leurs membres. S’il s’agit quelquefois de quelques centaines d’hommes et de femmes, ce sont, plus souvent, des milliers, des dizaines de milliers, de centaines de milliers, voire de millions de personnes.

Le nombre et l’unité au sein de mouvements organisés est une force qui peut constituer un groupe de pression dont l’action stratégique sera déterminante pour que le pouvoir en place prenne des décisions qui favoriseront la promotion du développement des groupes locaux.

Des stratégies et des modes d’action

La stratégie globale de I’IRED repose sur deux leviers essentiels, qui sont, d’une part, le renforcement institutionnel, qui s’adresse non seulement aux organisations de développement, mais aussi aux individus et aux leaders de ces organisations, et d’autre part, le networking, ou la création et le développement de réseaux, qui permettent de sortir les organisations de leur isolement
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Cette stratégie de networking sera progressive. Dans un premier temps, elle part de l’individu, du leader, homme ou femme engagée dans une activité orientée vers le changement et qui constitue peu à peu un groupe ou crée une association ou un mouvement. La réussite de l’action en réseau repose sur la force des partenaires, sur leur capacité à “jouer le jeu”, à entrer directement en contact avec d’autres partenaires du réseau, sans passer par le centre.

La stratégie globale de I’IRED, elle s’articule autour de trois processus :

Penser globalement, agir localement

On peut souvent lire la devise Penser globalement, agir localement (”Think globally, act locally). Bien que cette stratégie soit nécessaire, il est important de reconnaître qu’il s’agit là d’un processus qui part du sommet pour aller vers la base, et qui a donc tendance à imposer aux organisations locales ce qui est pensé en dehors d’elles-mêmes (top-down approach).

Penser localement et relier globalement est au contraire une stratégie qui repose sur la participation locale des populations, et qui veut atteindre le niveau global et ses décideurs (bottom-up approach).

La pratique nous apprend que ni l’une ni l’autre de ces approches ne peut se suffire à elle- même. L’approche top-down (du global vers le local) est souvent celle de l’administration, qui cherche à faire participer les populations dans ses projets, sans y parvenir. L’approche bottom-up (du local vers le global), promue par les ONG et les organisations populaires, rencontre, quant à elle, des blocages systématiques au niveau des instances administratives, politiques ou militaires, qui l’empêchent d’atteindre ses objectifs.

La stratégie de 1‘IRED est donc, partout où cela est possible, c’est-à-dire dans des Etats démocratiques, une rencontre de ces deux approches, qui se situe au niveau de la région et entraîne des effets beaucoup plus conséquents sur le développement local et sur les populations, ainsi que sur le développement national et global.

Le passage du micro au macro

La plupart des organisations de développement sont engagées dans des activités micro au niveau local parmi les populations les plus “pauvres”. Leur action est volontaire. Même si elles manquent quelquefois de compétences techniques et de moyens financiers, la plupart des initiatives prises au niveau local sont des succès car l’action de ces organisations de développement est adaptée aux besoins, soutenue par des hommes du cru, motivés, acceptés par les leurs. L’initiative repose sur la participation active des populations. La démarche a été pensée ensemble. Elle est entreprise dans une volonté commune. C’est la clef de son succès. Si ces initiatives peuvent en outre bénéficier d’appuis techniques, de financements, de l’ouverture des marchés, et s’entourer de compétences techniques et d’une gestion de qualité, leur réussite est garantie.

Comment passer de ce succès au niveau micro à une plus grande dimension ?

Certains diront qu’il faut additionner des succès micro, alors que d’autres penseront qu’il faut plutôt planifier le développement du micro-macro, et, dans cette perspective, étudier les étapes de ce passage et agir en conséquence.

L’IRED croit que le développement doit dans un premier temps se situer à un niveau micro et entraîner la participation des populations locales. Elle croit aussi qu’une réussite micro est insuffisante si elle n’est pas porteuse d’une capacité d’extension et d’un effort pour multiplier les résultats sur une échelle plus large.

Enfin, si notre ambition est d’apporter des réponses nouvelles aux problèmes du développement, notre réflexion et nos stratégies doivent aussi se situer au niveau macro. C’est la raison pour laquelle 1’IRED s’investit dans la capitalisation d’études de cas, ou l’étude du passage réussi du micro au macro. Des programmes de recherche-action, en cours, devraient permettre de tirer les leçons utiles pour que notre action réussie au niveau local puisse avoir un impact plus important dans d’autres régions ou dans d’autres pays.

La progression vers l’autonomie.

Cette stratégie a déjà été décrite, mais il convient de rappeler que les ONG et organisations de développement ne peuvent plus continuer à vivre dans cette contradiction qui consiste à promouvoir une philosophie reposant sur l’auto-développement ou la self-reliance, tout en étant financées en majorité (de 80 à 98%) par l’aide extérieure.

Progresser vers l’autonomie signifie donc acquérir la maîtrise d’un certain nombre de techniques, de méthodes et de stratégies susceptibles de permettre aux organisations de développement de mieux collaborer avec leur environnement (gouvernements, banques, aide extérieure) et de gérer au mieux les conflits que peuvent engendrer la promotion d’activités économiques au sein d’une organisation dont l’objectif final est social.